BRILLER
A TOUT PRIX
Nettoyer,
désinfecter, blanchir, faire briller...
la société contemporaine a déclaré
la guerre aux saletés. Aujourd’hui,
il faut être toujours plus hygiénique
et aseptiser à tout va. Une phobie du microbe
qui incite à briquer et à nettoyer
à grand renfort de poudres, lessives ou
lingettes. Une pratique pas si nette pour notre
environnement et notre santé. Plongeon
dans les profondeurs de l’eau, enquête
sur les méfaits des détergents et
grand ménage dans les méandres de
leurs rayonnages.
Des
détergents pas si nets
D’un côté,
la ménagère qui astique son carrelage,
récure son évier, nettoie son foyer.
De l’autre, des rivières qui font
les frais de cette quête de propreté
et tentent d’absorber les eaux usées.
Des pratiques quotidiennes de part et d’autre
de la planète. Aujourd’hui, rares
sont les régions du monde épargnées
par la pollution aquatique. Selon la Commission
mondiale de l’eau plus de la moitié
des fleuves du monde sont gravement touchés
et pollués. Ceci entraîne une dégradation
des écosystèmes et compromet la
santé et les moyens d’existence des
hommes qui en dépendent. Qu’ils soient
émis dans l’air ou répandus
sur les sols, la majorité des polluants
finissent leur vie dans les milieux aquatiques
par le biais de l’eau.
On pourrait penser
que la mauvaise qualité des rivières
est le seul fait des industriels et de l’agriculture.
Si ces secteurs sont responsables d’une
grande part des pollutions, les particuliers ne
sont pas exemptés de responsabilité.
En France, les phosphates rejetés dans
l’environnement proviennent pour moitié
des usages domestiques, détergents ou lessives
phosphatées en tête.
Des
lessives qui salissent ?
« Laver plus
blanc que blanc » a longtemps été
la principale préoccupation des fabricants
de lessives, reléguant au dernier rang
celle de protéger l’environnement,
faute de réglementation. Résultat
: des lessives chargées en produits nocifs,
et notamment en phosphates, ont déversé
pendant des années des composés
chimiques dans les cours d’eau, favorisant
l’eutrophisation*.
La dégradation
des milieux aquatiques et la difficulté
grandissante de traiter ces eaux pour les rendre
potables - il est très coûteux de
dé-phosphater les eaux usées dans
les stations d’épuration - ont fait
évoluer la recherche et les consciences.
En Europe occidentale, depuis le début
des années 80, les rejets phosphatés
ont notablement diminué (de 50 à
80%), en raison de l’amélioration
spectaculaire du traitement des eaux usées
et de l’introduction massive de détergents
sans phosphate. La Suisse est allée plus
loin en 1986 en bannissant les phosphates de la
plupart de ses pratiques. Leur éradication
a été un succès puisqu’elle
a permis au lac Léman de retrouver sa superbe.
En quelques années, sa concentration en
phosphore a chuté de 60%.
En France, le composé
a encore de beaux jours devant lui. En 1991, le
Ministère de l’environnement a bien
essayé de l’écarter en négociant
avec les industriels une convention plafonnant
à 20% le taux de phosphore dans les lessives
(qui pouvaient jusqu’alors en contenir jusqu’à
50%). Mais depuis, même si toutes les marques
proposent au moins une lessive sans phosphate,
la plupart en contiennent encore.
La
mousse qui tue
Pire que les phosphates,
les tensioactifs appréciés pour
leur pouvoir moussant et dégraissant, sont
présents dans tous les produits de lessive.
Difficilement dégradables, ils ravagent
les fronts de mer. Il y a une trentaine d’années,
scientifiques italiens et français sonnent
l’alarme, constatant que les tensioactifs
reviennent sous formes d’embruns marins
sur tout le littoral méditerranéen.
Ils dissolvent la cire protectrice des aiguilles
des pins et laisse le champ libre à l’air
marin, chargé de sel qui brûle alors
les arbres. A Port-Cros et à Porquerolles,
autour du delta de l’Arno en Italie, de
vastes champs de piquets ont remplacé les
étendues de pins parasols. Pourtant aujourd’hui,
les chimistes ont mis au point d’autres
procédés, tout aussi efficaces,
à base d’acides gras qui se dégradent
au cours de leur passage dans les stations d’épuration.
Leur usage reste encore marginal.
© EKWO
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DOSSIER
EKWO ATTITUDE
texte : Hélène Binet
et Bénédicte Hervio
Quelques règles à respecter
pour laver sans ( trop ) polluer
:
Leçon
numéro 1 :
Eviter de
sous-remplir la machine. Cas d’urgence,
vous avez besoin d’un chemisier propre
illico-presto. Ne lancer surtout pas une
machine pour cet unique vêtement car
votre lave-linge risque de consommer autant
d’énergie et d’eau que
pour l’intégralité de
votre bac de linge sale. Complétez-la
avec d’autres vêtements ou bien
prenez votre courage à deux mains
et frottez !
Leçon
numéro 2 :
Doser selon la salissure et la
dureté de l’eau. La dose de
lessive que vous utilisez dépend
de la dureté de votre eau. Vous pouvez
vous en informer dans votre commune. En
principe, il est indiqué au dos du
paquet de votre lessive, la quantité
à ajouter ou à enlever en
conséquence.
Leçon
numéro 3 :
Utiliser la température
recommandée la plus basse. Inutile
de faire bouillir les vêtements pour
les détacher. La plupart des textiles
seront impeccables après un lavage
à 40°C et vouspermettront d’économiser
environ 50% de consommation d’électricité.
Leçon
numéro 4 :
Réduire les déchets
dus aux emballages. La meilleure façon
de diminuer la quantité d’emballage
est d’acheter des recharges. De nombreuses
marques en proposent et ce, pour le même
prix que le bidon traditionnel. |
Le
point sur les détergents
Qu’est-ce
qu’un détergent ?
Poudre à
récurer, liquide vaisselle, shampoing...
le détergent est un produit chimique utilisé
pour sa capacité à éliminer
les salissures.
De
quoi est-il composé ?
Quelque soit le détergent, il
comprend toujours la même base : des tensio-actifs
ou agents de surface, un squelette qui lui confère
sa consistance et de l’eau. Ensuite y sont
ajoutés des adjuvants, des parfums et des
colorants. Parmi ces composants, certains sont
dangereux.
Dans
les parfums :
attention aux phtalates. Des tests en laboratoire
ont montré des corrélations entre
ces produits chimiques et l’apparition de
cancers ou de dysfonctionnements du système
reproducteur. Les phtalates peuvent également
déclencher de l’asthme, des réactions
allergiques, des irritations au niveau de la respiration
ou de la peau.
Dans
les adjuvants :
les phosphates fortement caustiques peuvent s’avérer
mortels lorsqu’ils sont avalés. D’autres
ingrédients se trouvent nocifs s’ils
sont associés : le diéthanolamine
et le tri-éthanolamine (des conservateurs
souvent non révélés) peuvent
réagir avec des nitrites et conduire à
différentes formes de cancers.
Pour éviter
les risques, tout en respectant l’environnement
choisissez plutôt un détergent contenant
: du savon ou des tensioactifs d’origine
végétale ou animale. Ils se biodégradent
mieux que ceux à base de pétrole
des adjuvants tels que :le citrate, le silicate
ou les zéolites (pas de phosphate) des
agents blanchissants comme le percarbonate de
sodium pas de colorant pas de parfum ou alors
à base d’huiles essentielles
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